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ARTE.TV – À LA DEMANDE – DOCUMENTAIRE
Sarah Bernhardt (1844-1923), la première à imprimer sa marque sur Hollywood Boulevard, la première à se produire dans le monde entier et à susciter toujours plus d’admirateurs, la première « star mondiale ». Le documentaire d’Aurine Crémieu brosse le portrait de « la Divine », qui mit en scène sa propre légende, à l’aide de documents d’archives, de collages animés et de témoignages. Et en faisant intervenir la comédienne Elsa Lepoivre de la Comédie-Française, qui lit des écrits de celle qui a joué tous les plus grands classiques du répertoire, qui fut aussi peintre et sculptrice, et à qui le Petit Palais a consacré une riche exposition, en 2023, pour les 100 ans de sa mort.
Fille d’une courtisane qui n’a pas le temps de pouponner, de père inconnu, Sarah Bernardt est, dès l’âge de 9 ans, envoyée au couvent : « La mère supérieure a un sourire très doux et Dieu m’inspire », dira-t-elle. Avec sa silhouette mince et sa chevelure indomptable, ses camarades la moquent, la surnomment la « négresse blanche ». De cette insulte, elle fait une force.
A 15 ans, retirée du couvent, elle évolue dans les salons bourgeois du 265, rue Saint-Honoré, à Paris, entourée de femmes – sa mère et ses tantes sont toutes de « belles horizontales » comme l’on nommait alors les courtisanes. L’oisiveté et la fréquentation d’hommes puissants de passage font partie de son quotidien. Le duc de Morny, demi-frère de l’empereur Napoléon III, décèle chez l’adolescente filiforme et pâle un charisme insoupçonné de tous. « Suivez mon conseil, mettez-la au conservatoire », dit-il à sa mère. Sarah excelle dans ses cours. Dès lors, ce sera la lumière des projecteurs, la lueur dans les pupilles du public, qu’elle recherchera avec passion.
« Nous autres, les vibrants, nous avons besoin de croire pour faire croire. Notre vraie vie, c’est là-bas, dans le foyer incandescent de toutes les passions vécues ou rêvées. C’est le battement de cœur perpétuel, c’est la névrose enfin, à son dernier degré », confiera-t-elle. Révélée sur la scène du Théâtre de l’Odéon, à Paris, dans La Dame aux Camélias, de Dumas fils, puis dans Le Passant, de François Coppée, la comédienne s’impose comme une grande tragédienne, dotée d’une personnalité jonglant entre mystère et exubérance. Un tempérament et un talent qui lui assurent une notoriété mondiale. « J’ai traversé les océans en emportant mon rêve d’art en moi, et le génie de ma nation a triomphé — et c’est ce dont je suis la plus fière », déclare Bernhardt à la presse française, en 1896, à l’issue d’une de ses grandes tournées américaines.
Mais la scène ne suffit pas au « monstre sacré », terme inventé pour elle par Jean Cocteau. Amoureuse passionnée, elle enchaîne les conquêtes, Mounet-Sully, Lucien Guitry, Louise Abbéma. Mais son seul véritable amour restera son fils, Maurice, toujours à ses côtés, issu d’une idylle avec le prince belge Henri de Ligne. Il s’éteint en 1928, cinq ans après sa mère. Impossible de vivre sans son soleil.
Sarah Bernhardt. Pionnière du show-business, écrit et réalisé par Aurine Crémieu (Fr., 2022, 53 min). Sur Arte.tv jusqu’au 20 août.
Théo Guigui-Servouze
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